Kenza fixait son assiette, à moitié absorbée dans la conversation animée entre sa mère et sa grand-mère. Les mots flottaient autour d’elle comme un brouillard, sans vraiment pénétrer.
Elle avait beau se dire que c’était sûrement un bug ou un hasard, son téléphone posé à côté de son verre lui semblait… étranger. Comme si ce n’était plus le sien.
Elle le prit discrètement. L’écran était noir, mais encore tiède dans sa main.
Son cœur battit plus vite. Elle ouvrit Instagram.
Une notification venait d’apparaître : “Votre mot de passe a été modifié depuis un autre appareil.”
Ses doigts se crispèrent. Elle cliqua immédiatement pour réinitialiser, mais l’application la déconnecta toute seule.
— Kenza ? Tout va bien ? demanda sa mère.
Elle leva les yeux, esquissa un sourire forcé.
— Oui, oui… je… je vais juste me servir un peu d’eau.
Elle quitta la table et monta dans sa chambre, respirant plus vite. Assise sur le bord du lit, elle essaya de reprendre le contrôle de son compte. Après quelques tentatives, elle réussit à changer à nouveau son mot de passe.
Un soulagement de courte durée.
Une notification nouvelle apparut à l’instant même où elle reposait le téléphone : “Connexion depuis Lyon, France”.
Elle sursauta, comme si on avait frappé à sa porte sans prévenir.
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À plusieurs kilomètres de là, dans un appartement minimaliste éclairé par la lumière bleutée de trois écrans, il observait les lignes de code défiler.
Kenza venait de changer son mot de passe. Encore.
Il aimait la voir lutter, ça rendait le jeu plus intéressant.
Il ouvrit un dossier sur son bureau : Photos_K. Dedans, une image fraîchement récupérée, prise depuis la caméra frontale de son téléphone.
Kenza, assise sur son lit, les yeux rivés sur l’écran, une mèche de cheveux tombant sur son visage.
Il agrandit la photo, passa lentement ses doigts sur le contour de son sourire.
— Parfaite…
Il avait eu des centaines de femmes dans sa vie. Models, actrices, héritières… Mais aucune ne déclenchait en lui cette curiosité féroce. Elle, elle n’avait aucune idée de sa valeur. Pas encore.
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Kenza posa le téléphone face contre le lit, comme si ça pouvait empêcher quelqu’un de la voir. Son esprit tournait à toute vitesse : et si c’était un virus ? Un hacker ? Mais pourquoi elle ? Elle n’avait rien d’important… juste des photos, des messages privés…
Et soudain, elle pensa à ses recherches.
À toutes ces heures passées à chercher des écoles de commerce spécialisées dans le luxe, à cliquer sur des articles parlant de New York, de stages prestigieux, d’événements mode.
Elle frissonna.
Et si quelqu’un… regardait ?
Elle secoua la tête. Trop de films, voilà tout.
Sa mère l’appela depuis l’escalier :
— Kenza ! Viens dire au revoir à ta grand-mère !
Elle inspira profondément et descendit, tentant de cacher son trouble.
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Plus tard dans la soirée, après le départ de la famille, Kenza prit une douche chaude. L’eau ruisselant sur ses épaules lui apporta un semblant de réconfort.
Elle sortit, enfila un pyjama large et s’installa sur son lit avec un livre.
Mais au bout de quelques pages, ses yeux glissèrent vers son téléphone.
Un message venait d’arriver, inconnu, sans photo de profil.
“Jolie couleur, le pyjama.”
Le livre lui échappa des mains.
Elle relut le texte plusieurs fois, son souffle bloqué dans sa gorge.
Elle ne répondit pas. Ses doigts tremblaient trop.
Elle jeta un coup d’œil autour d’elle, vers la fenêtre. Les rideaux étaient tirés. Pourtant, un sentiment oppressant se glissa dans sa poitrine.
Elle éteignit le téléphone, le glissa sous son oreiller. Mais même ainsi, elle avait l’impression que quelque chose, quelque part, la fixait.
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Dans son loft, il ferma la fenêtre de messagerie, satisfait de sa première prise de contact.
Il ne voulait pas aller trop vite. Pas encore.
Bientôt, elle ne pourrait plus ignorer sa présence.
Il se leva, enfila un manteau noir et quitta l’appartement. Les rues de Lyon étaient calmes, presque désertes à cette heure.
Il savait où elle habitait.
Et ce soir, il voulait voir par lui-même la lumière de sa chambre avant qu’elle ne s’éteigne.
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Kenza, allongée, fixait le plafond. Son esprit refusait de se calmer. Elle se disait qu’elle appellerait Samir demain pour vérifier à nouveau son téléphone. Mais une autre pensée se glissait entre les lignes de ses inquiétudes :
Et si… ce n’était pas un hasard ?
Elle finit par se tourner vers la fenêtre. Par réflexe, elle écarta un coin du rideau.
Dans la rue, juste en face, un homme passait.
Grand, silhouette droite, manteau sombre.
Il ne leva pas les yeux. Mais elle sentit, comme un instinct, qu’il savait qu’elle le regardait.
Elle lâcha le rideau, recula d’un pas.
Son cœur battait si fort qu’elle croyait qu’il allait briser le silence de la chambre.
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