MON STALKER CHERI
Acte 1, Scène 1
La scène s’ouvre dans un train bondé. Le vacarme des conversations, le crissement des rails et l’odeur de sueur mélangée au parfum bon marché saturent l’air. Eliana Crawford, dix-neuf ans, s’y trouve, debout, le visage fermé. Elle évite soigneusement de toucher quoi que ce soit, comme si ses mains pouvaient être contaminées par ce qu’elle appelle « le bonheur de vivre » des autres.
Ses yeux verts balayent la foule avec une lenteur calculée. À ses côtés, une femme rit si fort qu’elle en postillonne. Plus loin, un homme téléphone bruyamment à son patron.
— La comédie humaine dans toute sa splendeur…, songe Eliana avec un léger rictus.
Les gens s’agitent, parlent trop fort, respirent trop vite. Pour elle, chacun est une anomalie ambulante, une faiblesse qui attend d’être exploitée.
Soudain, un enfant assis dans les bras de sa mère lui lance sa peluche au visage. La petite bête en tissu tombe au sol, juste à ses pieds. Eliana se penche, la ramasse du bout des doigts. La peluche, équipée d’un mécanisme sonore, s’active :
— « Tu veux jouer avec moi ? »
Un rictus fugace étire ses lèvres pâles. L’enfant sourit, croyant avoir trouvé une alliée de jeu. Mais, d’un geste lent et précis, Eliana arrache la tête de la peluche. La voix devient saccadée, mécanique, presque suppliante :
— « Tu… veux… avec… m… »
Puis plus rien, sinon le bruit sec de la tête qui roule sur le sol métallique du wagon. Un cri déchirant fuse derrière elle, la mère horrifiée serre son enfant contre sa poitrine.
Eliana, satisfaite, esquisse un dernier sourire avant de lever l’ancre à l’arrêt suivant.
Arrivée dans son quartier, elle marche d’un pas calme. Un garçon sur un vélo la frôle brutalement, manquant presque de la faire tomber.
— « Dégage, Mercredi Addams ! » crache-t-il avant de filer.
Un soupir s’échappe de la bouche de la jeune femme. Elle ferme les yeux, et comme un mantra, commence à réciter :
— « Alexandre Vicoscki. Treize ans. Né le 3 septembre 2012. Habite au numéro treize, rue de la Croix. »
Un sourire dangereux se dessine sur ses lèvres.
— « Deux pour le prix d’un. »
Elle finit par s’arrêter devant une maison modeste. Sans hésiter, elle franchit la balustrade et se faufile dans la cour arrière. Là, le vélo du garçon est appuyé contre un mur. Eliana sort de son sac une clé à molette et s’accroupit. Un à un, elle dévisse les boulons avec une précision chirurgicale, chaque cliquetis résonnant comme une note d’une symphonie macabre.
Ses yeux brillent d’une lueur cruelle, et ses lèvres esquissent un sourire carnassier. Elle ne voit pas un vélo, mais une promesse de chaos. L’image du garçon s’écroulant lors de sa prochaine balade la réjouit déjà.
Elle relève la tête, inspirant profondément l’air du soir.
— Les gens ont peur de l’obscurité, mais moi j’y vois clair. Les monstres ne se cachent pas dans l’ombre… ils vivent à la lumière du jour, dans les visages idiots qui me croisent sans me voir.
Lorsqu’elle eut terminé, elle posa son outil, essuya ses mains et laissa tomber une dernière phrase, glaciale :
— « On me compare à Mercredi Addams ? Quelle insulte… pour elle. »
Un sourire satisfait illumina son visage, sombre et cruel. Dans son regard étincelait une promesse muette : ce n’était que le début.
***Téléchargez NovelToon pour profiter d'une meilleure expérience de lecture !***
13 épisodes mis à jour
Comments