Elles fuyaient.
Sans papiers, sans identité propre. Madame Iris et Noa glissaient hors de la ville comme des ombres fuyantes, usant de chemins détournés, évitant les regards et les barrages.
Heureusement, Iris avait mis de côté de l'argent — assez pour nourrir la petite, la vêtir, la protéger pendant ce long voyage incertain.
Elles quittèrent le pays, changèrent de noms, d'adresses, tentèrent de se fondre dans un monde où la liberté, la vraie, jusque-là, leur avait toujours échappé .
Mais Madame Iris avait un objectif clair : déposer Noa auprès de sa famille, cette famille qu'elle n'avait jamais revue depuis qu'elle-même avait été kidnappée, adolescente, par Monsieur Diablo — dont elle était, bêtement, tombée amoureuse à l'époque.
Elle leur envoyait la moitié de ses revenus chaque mois, leur avait écrit des lettres brèves, rassurantes, même si elle savait qu'ils n'avaient jamais cessé de la chercher.
Enfin, une nuit, elle déposa Noa endormie sur le porche de la maison familiale, une lettre soigneusement pliée à ses côtés. Dans cette lettre, Iris expliquait qui était la petite, ce qu'ils devaient faire, et que, désormais, c'était à eux de veiller sur elle.
Ils comprendraient. Ils prendraient soin d'elle.
Le lendemain, Noa ouvrit les yeux, et malgré son esprit d'enfant, comprit que Madame Iris ne reviendrait jamais. Ce foyer, chaud et accueillant, était son dernier cadeau — un dernier pardon pour avoir laissé s'échapper son innocence.
Iris erra deux jours durant dans la ville de son enfance, chaque coin de rue ravivant souvenirs et blessures. Puis, au cœur de la forêt où, des années plus tôt, elle avait croisé pour la première fois le regard de Diablo, elle prit sa décision.
Dans le silence des arbres, elle mit fin à sa course car qui pouvait vraiment vivre après autant d’horreur ? Elle laissa derrière elle le poids d'une vie volée, mais aussi la promesse d'une nouvelle aube pour Noa.
Enfin, les années passèrent.
Noa grandit sous le regard protecteur de sa famille adoptive, dans une maison pleine de rires et de lumière, loin des ombres qui avaient jadis tenté de l'engloutir.
Madame Iris, elle, avait été enterrée dans le silence. Dans cette forêt où elle avait décidé d'en finir. Et où l’enfer avait commencé pour elle. Quelle ironie.
Parfois, dans le bruissement des feuilles ou le souffle du vent, on croit entendre une voix, douce et lointaine, portant un serment — celui d'une liberté arrachée au prix du sacrifice, et d'un avenir à reconstruire.
Le monde continuait, imparfait, cruel, mais toujours porteur d'espoir.
Et quelque part, dans l'ombre ou la lumière, une histoire se poursuivait.
Celle d'une autre tenancière dans une établissement cruel où les humains n'étaient réduits qu'à des pièces de viande ou celle d'une petite fille qui n'avait personne pour la protéger des Porcs.
Le cauchemar ne finit jamais vraiment. Il se déplace, change d’apparence ou de cible. Le mal est profondément ancré dans la racine de ce système dégoûtant qui chosifie la personne en fonction des désirs de ces Porcs. Et tant qu’il y aura des Porcs, il y aura toujours quelqu’un pour les nourrir.
Fin.
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