Chapitre 2 – Nyrah, fille de l’ombre

La nuit étendait ses ailes d’encre sur Étheria, enveloppant les ruelles tordues des bas-quartiers dans un manteau de silence lourd et d’ombres mouvantes. Là où les lampes mourantes projetaient des éclats vacillants, la cité flottante semblait respirer une douleur ancienne, une douleur qu’on murmurait à voix basse, mais qui grondait au cœur de chaque pierre fissurée, dans chaque regard fuyant.

Nyrah Velyn avançait sans bruit, ses pas feutrés glissant sur les pavés brisés comme une ombre parmi les ombres. Sa silhouette svelte se fondait dans la pénombre, et ses yeux, d’un vert profond presque luminescent, scrutaient les recoins d’une vigilance instinctive. Elle connaissait ce labyrinthe comme la paume de sa main. Chaque fissure, chaque recoin, chaque souffle du vent portait une mémoire – une mémoire de souffrance, de perte, et de secrets enfouis.

Mais plus que tout, Nyrah portait en elle le poids d’un secret qui la consumait de l’intérieur. Une lignée maudite, celle des Velyn, ceux que les Élus avaient voulu effacer de la surface d’Étheria. Son sang était un poison, une réminiscence d’un temps révolu, un fragment dangereux de vérité que le pouvoir voulait oublier.

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La solitude d’une survivante

Assise au bord d’une fontaine à moitié détruite, Nyrah caressa doucement la surface de l’eau stagnante. Elle ferma les yeux un instant, laissant s’échapper un soupir étouffé. Le murmure lointain des arbres-mémoire pleurant les morts dans le vent semblait résonner avec sa propre douleur. Ces arbres, ces témoins silencieux du passé, étaient pour elle des confidents muets, seuls êtres à comprendre la profondeur de son exil intérieur.

Une brûlure familière irradiait de sa poitrine — ce n’était pas une blessure physique, mais le poids des souvenirs. Les visages d’ancêtres oubliés, les cris étouffés de l’innocence volée, la trahison suintant de chaque recoin de sa mémoire. Chaque nuit, ces fantômes la hantaient, tandis que le jour ne lui offrait que la froideur d’un monde indifférent.

Elle avait appris à dissimuler sa magie, à taire ses dons de guérisseuse, à étouffer la lumière qu’elle portait en elle, par peur d’attirer les chasseurs, par peur de replonger dans la tourmente. Les Élus, avec leur arrogance et leur cruauté, avaient juré d’éradiquer toute trace de sa famille. Nyrah était devenue un fantôme, une fille de l’ombre, condamnée à errer entre deux mondes : celui des puissants, et celui des oubliés.

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Le poids du passé

Un frisson la parcourut soudain. Elle ouvrit les yeux, son regard fixé sur une silhouette qui se découpait à l’entrée d’une ruelle adjacente. Kaël. Ce nom avait une saveur amère, une promesse de conflits et de secrets. Soldat des Élus, traqueur désigné pour éliminer toute menace, et pourtant, il portait en lui des démons qu’elle entrevoyait parfois, à travers des éclairs furtifs d’humanité.

Elle se rappela leur première rencontre — un face-à-face chargé de méfiance et de douleur. Kaël avait vu en elle une ennemie, un danger, mais il y avait eu ce moment, cette fissure dans son armure, où l’espoir semblait poindre, fragile et incertain.

Nyrah détourna le regard, reprenant son chemin vers son refuge, une vieille bâtisse délabrée où elle vivait recluse. Là-bas, dans l’obscurité, elle pouvait enfin s’abandonner à ses pensées, à ses cauchemars. Elle s’installa dans un fauteuil usé, la pièce faiblement éclairée par une bougie. Sur la table, un carnet ouvert révélait des croquis, des symboles, des notes sur la magie empathique qu’elle tentait de maîtriser — cette capacité unique à transformer la souffrance en lumière, mais qui la consumait à chaque fois un peu plus.

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Le poids de la honte

Un bruit soudain la fit sursauter. Elle se leva d’un bond, ses muscles tendus comme un arc prêt à décocher. Mais ce n’était qu’un rat, fuyant dans l’obscurité.

Elle se laissa retomber, le visage dans les mains. La honte la rongeait. Pas seulement celle de son passé d’abus, d’agression, de trahison — mais celle d’être l’héritière d’une lignée que tous voulaient oublier. Elle était née avec un fardeau, une marque invisible mais brûlante, celle d’une famille exterminée pour avoir osé défier l’ordre établi.

Chaque jour, elle luttait pour ne pas sombrer dans le désespoir. La magie qui coulait dans ses veines était à la fois un don et une malédiction. Si elle la laissait s’exprimer pleinement, elle risquait de s’effacer elle-même, consumée par la douleur qu’elle absorbait.

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Une visite inattendue

Un coup discret résonna à la porte. Nyrah retint son souffle, le cœur battant. Qui pouvait venir à cette heure ? Pas un allié, sûrement. Pas un ennemi non plus — ils ne s’embarrassaient pas de préambules.

Elle s’approcha lentement et ouvrit un petit interstice. Une silhouette encapuchonnée se tenait là, tremblante.

« Nyrah... » murmura une voix familière.

Elle reconnut Maître Elrik, son ancien mentor, un survivant de la purge des Velyn. Son visage était marqué par les ans et les épreuves, mais ses yeux brillaient d’une détermination implacable.

« Il faut que tu viennes avec moi. Le temps presse. Ils cherchent à t’éliminer... encore plus qu’avant. »

Nyrah hésita, le poids de la peur écrasant sa volonté. Mais au fond d’elle, une étincelle d’espoir — peut-être, enfin, la chance de rétablir la vérité.

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L’ombre des Élus

Alors qu’elle quittait son refuge, le silence de la nuit fut déchiré par un cri lointain, un cri qui semblait s’infiltrer dans chaque pore d’Étheria. Nyrah frissonna, consciente que ce cri annonçait une nouvelle tempête.

Les Élus, avec leur magie noire, puisaient dans la souffrance des Disparus, dans les cris des opprimés, pour alimenter leur puissance. Une alchimie perverse où la douleur humaine était la source même du pouvoir. Et Nyrah, en tant que guérisseuse, portait en elle la capacité de briser ce cycle — ou d’être écrasée par lui.

Elle tourna la tête vers les cieux obscurcis, où flottaient les tours d’ivoire de la cité haute, là où la noblesse des Élus menait ses intrigues. Le contraste avec les bas-fonds ne pouvait être plus cruel : en haut, l’éclat froid et artificiel, en bas, la pourriture et la survie.

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Rencontre avec le passé

Alors qu’ils avançaient vers un lieu secret, Maître Elrik lui parla de la mémoire oubliée des arbres-mémoire, de leur pouvoir à conserver les secrets des temps anciens, des rituels perdus qui pourraient réveiller la lumière enfouie dans leur monde.

« Nyrah, » dit-il doucement, « ton destin n’est pas seulement d’échapper à l’ombre. Tu portes la clé pour ranimer l’espoir. Mais pour cela, il faut d’abord affronter ce que tu as fui toute ta vie. »

Nyrah hocha la tête, sentant la terreur et la détermination se mêler en elle.

Elle comprenait que sa fuite était terminée.

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Le poids d’un héritage

À l’aube, alors que les premières lueurs perçaient l’horizon, Nyrah s’arrêta devant un arbre-mémoire, immense et noueux, dont les feuilles semblaient pleurer des gouttes argentées.

Elle posa la main sur son tronc rugueux et ferma les yeux. Une vague de souvenirs lui traversa l’esprit : les visages des siens, la pureté bafouée, la trahison des Élus, la promesse d’un renouveau.

Cette promesse, fragile et incertaine, brûlait désormais en elle comme une flamme ardente.

Elle n’était plus simplement une fille de l’ombre.

Elle était l’héritière des cendres, prête à rallumer la lumière.

**

Mais alors qu’elle se relevait, une silhouette encapuchonnée surgit des ténèbres, une lame scintillante levée vers elle.

Un souffle glacé traversa la nuit.

Et Nyrah sut, au plus profond d’elle-même, que le combat ne faisait que commencer.

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Fin du chapitre 2.

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