Chapitre 4 – Stratégies Silencieuses

Le lycée Saengthong reprenait son rythme quotidien : les clubs, les examens, les rumeurs. Mais derrière cette façade banale, des tensions discrètes se tissaient. Et Alex, toujours à l’écart mais jamais loin, commençait à en percevoir les nuances.

Depuis quelques jours, il avait remarqué un garçon — grand, athlétique, le regard sombre — qui semblait toujours apparaître dans l’ombre de Lay. Ce garçon, c’était Tan. Il ne faisait rien de direct, mais Alex avait l’œil. Il reconnaissait ce genre de regard. Ce mélange de regrets, de jalousie, et de non-dits. Il l’avait vu mille fois. Et souvent, juste avant qu’un déséquilibre ne se crée.

Un midi, alors qu’il sortait du bâtiment principal, Alex vit Tan observer Lay et Perth du coin de l’œil. Perth riait à une remarque discrète de Lay. C’était léger, innocent. Mais Tan, lui, serra les dents.

Alex fronça les sourcils. Ce n’était pas de la simple inquiétude. C’était personnel.

***

Plus tard dans la journée, Alex décida d’approcher Tan. Il n’avait jamais vraiment parlé avec lui, mais il n’avait pas besoin d’en savoir beaucoup pour comprendre ce qu’il risquait d’interférer.

Il le retrouva près du terrain de basket, seul, lançant distraitement des ballons contre le mur.

— Tu tires bien, dit Alex en s’approchant calmement.

Tan le regarda, méfiant.

— On se connaît ?

— Pas encore.

— Alors pourquoi tu me parles ?

Alex sourit, détendu.

— Parce que t’as l’air d’avoir besoin d’un exutoire. Et moi, j’ai de l’expérience avec les gens qui bouillonnent sans savoir où mettre tout ça.

Tan haussa un sourcil.

— Je vais très bien.

— T’en es sûr ? Parce que ton regard quand tu vois Perth avec Lay… c’est pas exactement paisible.

Le silence tomba. Tan détourna les yeux.

— C’est pas tes affaires.

— Tu as raison. C’est pas mes affaires. Mais Lay est celles de Perth. Et moi, Perth, c’est mon frère d’enfance. Alors, disons que je veille.

Tan jeta la balle contre le mur, plus fort.

— Tu veux quoi, au juste ?

— Je veux juste te dire ceci : si t’as quelque chose à dire à Lay, dis-le. Sinon, recule avant de devenir un poids pour lui. Il mérite pas d’être au milieu de ça.

Tan le fixa, surpris par la sincérité calme d’Alex. Il s’attendait à une confrontation. Pas à une mise en garde presque respectueuse.

— Tu parles bien, dit Tan.

— Parce que je préfère parler que foutre le feu.

Alex tourna les talons, laissant Tan seul avec ses contradictions.

***

Pendant ce temps, Lay et Perth passaient de plus en plus de moments ensemble. Parfois dans la salle de musique, parfois juste à marcher sans but dans les couloirs. Perth n’était plus dans la démonstration. Il était simplement là, présent, honnête.

— T’as peur ? demanda-t-il un jour à Lay, alors qu’ils s’étaient posés derrière le gymnase.

— Oui, avoua Lay sans détour.

— De quoi ?

— De moi… avec toi. De ce que ça veut dire. De ce que les gens vont dire. Et de ce que je ressens que je ne comprends pas encore.

Perth le regarda longtemps.

— Je t’imposerai rien. Je veux juste qu’on continue à marcher. Même lentement.

Lay ne répondit pas, mais il resta là. Et parfois, le silence est une promesse.

***

Le soir venu, Alex raconta à Perth sa conversation avec Tan.

— Tu sais qui il est ? demanda-t-il.

— Tan ? Oui. Il est très proche de Lay depuis des années. Pourquoi ?

— Il est amoureux de lui. Ou en colère contre lui. Peut-être les deux. Fais attention.

Perth soupira.

— Je m’en doutais. Mais Lay ne m’a rien dit.

— Parce qu’il ne voit pas tout. Mais moi, je peux m’en occuper.

— T’es pas obligé.

— Je sais. Mais je vais le distraire un peu. Juste pour t’alléger le terrain. T’as assez à gérer avec toi-même.

Perth sourit.

— Merci, Lex.

— Tu me dois une pizza. Et un solo à la guitare.

— Marché conclu.

***

Le lendemain, Alex croisa Tan dans la cour.

— Hey. Ça te dirait de jouer un match un de ces soirs ? Juste toi et moi. J’ai besoin de décompresser, et tu sembles être du genre à frapper fort sur le ballon.

Tan hésita, surpris. Puis haussa les épaules.

— Pourquoi pas.

Un jeu amical ? Ou une stratégie bien menée ? Peut-être un peu des deux.

Mais une chose était claire : Alex avait désormais un œil sur tout. Et si Perth voulait avoir une chance avec Lay… il comptait bien lui en donner l’espace.

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