Ce qu’il ne dit pas

Les jours passèrent, et les apparitions de Kuroko devinrent presque banales. Il faisait désormais partie du décor – un élément étrange mais accepté. Les membres de la Génération Miracle, pourtant si rationnels et sûrs d'eux, ne pouvaient s'empêcher de sentir que cette présence silencieuse posait plus de questions qu'elle n'apportait de réponses.

Et pourtant, il revenait. Toujours. Inlassablement.

Un jour, au milieu d'un entraînement, Midorima s'arrêta net après avoir vu Kuroko effleurer le ballon. Encore une fois, le cuir réagit à ce contact impossible.

— Je ne comprends pas, dit-il à voix haute. Comment peut-il interagir avec le ballon, mais passer à travers tout le reste?

Les autres joueurs s'arrêtèrent. Tous s'étaient déjà posé la question. Aucun n'avait osé la formuler aussi clairement.

— Et pourquoi peut-il parfois... nous toucher, ajouta Midorima, fronçant les sourcils. Pas tout le temps. Juste... parfois.

Kise haussa les épaules, mal à l'aise.

— C'est peut-être parce qu'il est... un fantôme? Ou... quelque chose d'approchant. Je veux dire, ça expliquerait tout, non?

— Non, justement, répondit Midorima. Ça n'explique rien. Il touche le ballon, il rebondit dessus, il le fait tourner. Mais il traverse les murs, les bancs, le sol. Et nous... parfois oui, parfois non.

Akashi, resté silencieux jusque-là, prit enfin la parole.

— Je pense qu'il est réel, dit-il simplement. Je l'ai vu interagir avec le ballon. Je l'ai senti passer près de moi. Il est là.

— Alors pourquoi ce comportement incohérent? répliqua Midorima. Ce n'est pas scientifique. Ce n'est pas logique.

Aomine croisa les bras, pensif.

— Peut-être qu'il peut interagir seulement avec ce qui compte pour lui.

Un silence tomba.

— Le basket... murmura Kise.

Midorima hocha lentement la tête. Le ballon. Le jeu. Et eux. Seulement eux.

Le groupe resta un moment immobile, contemplant cette hypothèse. C'était insensé.

Et pourtant, c'était la seule explication qui collait à ce qu'ils observaient.

— Il nous suit depuis le début, dit Aomine. Et il ne s'est jamais intéressé à autre chose.

— Vous pensez qu'il... était l'un des nôtres? demanda Kise d'une voix hésitante.

Midorima répondit avec lenteur:

— Je ne sais pas. Peut-être qu'il aurait dû l'être. Peut-être que nous l'avons oublié. Même si je ne vois pas comment on aurait pu l'oublier.

Un frisson parcourut les joueurs.

Kuroko, toujours à l'écart, se tenait près du bord du terrain. Il les regardait. Ou plutôt... il les étudiait.

Son visage était neutre. Toujours cette absence d'expression, comme une photographie qui s'efface.

Mais quelque chose dans son regard trahissait une attente. Une question.

Ou une blessure ancienne, qu'il était le seul à porter.

— Nous devrions en apprendre plus, dit Kise. Peut-être qu'il peut nous aider. Peut-être même... améliorer notre jeu.

Midorima secoua la tête.

— C'est dangereux. On ne sait pas ce qu'il est. Je préfère observer, encore. Et comprendre avant de le laisser interférer.

Les autres acquiescèrent, chacun plongé dans ses pensées. Aucun ne pouvait nier que Kuroko semblait profondément lié à eux. Mais le comment et le pourquoi restaient hors d'atteinte.

Et Kuroko, lui, se taisait. Comme toujours.

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À la fin de l'entraînement, alors que les lumières du gymnase s'éteignaient une à une, Midorima s'attarda un instant. Il jeta un dernier regard vers l'endroit où Kuroko s'était tenu un instant plus tôt.

— Je vais continuer à l'observer, dit-il, presque pour lui-même. Je veux savoir ce qu'il cache.

Les autres ne répondirent pas, mais leur silence équivalait à une approbation.

Alors qu'ils quittaient le terrain, aucun ne put s'empêcher de se retourner une dernière fois.

Mais le terrain était vide.

Et pourtant, dans le silence du gymnase, on aurait pu jurer entendre le bruit d'un ballon qui rebondit... tout seul... un ballon aussi invisible que celui qui jouait avec...

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