Le matin se leva sans prévenir.
Pas de lumière dorée. Pas de chant d’oiseau. Juste ce voile gris, épais, presque triste.
Amelia ne ferma pas l’œil de la nuit.
Elle avait laissé son casque posé sur le bureau, comme s’il pouvait exploser à tout moment.
Elle le regardait du coin de l’œil, mais refusait de l’approcher.
Elle avait entendu cette voix.
Elle avait ressenti cette note.
Et elle savait que rien ne serait plus jamais comme avant.
Ses doigts tremblaient encore un peu.
Elle finit par se lever, mécaniquement.
Boire un verre d’eau, se passer le visage à l’eau froide, essayer de se convaincre que tout allait bien.
Mais il y avait cette sensation dans ses tempes.
Comme une pulsation continue.
Un signal.
Elle s’assit devant son synthé.
Celui-là, il n’avait rien de spécial, juste un clavier un peu usé.
Mais depuis cette nuit, elle ne le voyait plus pareil.
Elle posa les mains dessus. Ferma les yeux.
Elle n’allait pas jouer. Pas aujourd’hui.
Elle voulait juste... ressentir.
Et le son revint. Faible, subtil, mais réel.
Un battement grave.
Comme une basse lointaine.
Mais ce n’était pas dans ses oreilles. C’était sous sa peau.
Elle essaya de bouger les doigts, mais une résistance étrange la bloqua.
Comme si le clavier lui disait : pas encore.
Puis une voix s’éleva dans sa tête.
Pas un mot.
Juste une émotion.
Tristesse.
Force.
Solitude.
Elle rouvrit les yeux d’un coup. Le casque vibrait à nouveau.
Elle le prit avec lenteur, hésitante, et le replaça sur ses oreilles.
Il n’y avait pas de son. Mais elle entendit tout.
Des cris.
Des battements.
Des souvenirs qui n’étaient pas les siens.
> Une scène floue.
> Une femme. Des lumières rouges.
> Une course. Une chute.
Amelia recula, le souffle court.
— Qu’est-ce que c’est… ?
Puis elle sentit une pression sur son cœur.
Pas douloureuse. Pas méchante.
Juste... ancienne.
Elle comprit que le casque n’était pas juste un objet.
C’était un canal.
Un passage.Et qu’elle, Amelia, n’était pas une simple fille avec un goût musical étrange.
Elle était une Porteuse, une Élue.
Mais elle ne savait pas encore pourquoi.
Ni ce que cela allait lui coûter.
Elle laissa tomber le casque sur le lit.
Le silence revint. Épais. Lourds. Chargé.
Et au fond d’elle, une voix qu’elle n’avait pas entendue depuis longtemps.
“Amelia… écoute.”...
Elle n’avait pas quitté sa chambre depuis des heures.
Le casque, posé là, sur le lit, semblait l’observer.
Mais ce n’était pas lui qui la hantait.
C’était cette voix.
Amelia… écoute.
Elle l’avait entendue clairement.
Pas un souvenir. Pas une illusion.
Une présence.
Et ce prénom, prononcé avec douceur et gravité, elle ne pouvait pas l’oublier.
C’était la voix de sa mère.
Elle se leva, lentement.
Tout en elle était fatigué. Et pourtant, quelque chose l’appelait.
Elle s’agenouilla devant une vieille malle en bois, poussiéreuse, coincée sous son lit.
Elle ne l’avait pas ouverte depuis des années.
C’était celle de sa mère.Avant de disparaître, elle lui avait dit : *“Tu ouvriras cette malle quand ton silence se mettra à parler.”*
Amelia ne comprenait pas, à l’époque.
Mais maintenant, c’était évident.
Le silence parlait.
Et il criait même parfois.
Elle souleva le couvercle.
L’intérieur était chargé de vieilles cassettes, des pages froissées, des partitions incomplètes, des carnets à moitié brûlés. Et au centre… une lettre.
Elle la prit.
L’encre était légèrement effacée, mais le message restait lisible.
> “À toi, ma fille. Si tu lis cette lettre, c’est que le Flow t’a trouvée.
> Tu ne m’as jamais connue comme je suis vraiment.
> Ce monde ne t’a jamais montré ce que je suis.
> Mais dans le Flow, nous sommes entières.
> Le Flow Libre ne se joue pas. Il se vit.
> Et maintenant, c’est ton tour.”*
Amelia sentit sa gorge se serrer.
Sa mère n’était pas une simple passionnée de musique.
Elle était une Porteuse, elle aussi.
Elle comprenait maintenant pourquoi sa voix résonnait encore.
Pourquoi le casque vibrait.
Pourquoi les notes jouaient toutes seules.
Le Flow Libre était une *mémoire vivante*.
Et Amelia… venait de l’ouvrir.
Au fond de la malle, une vieille clé.
Rouillée. Étrange. Avec un symbole qu’elle n’avait jamais vu.
Un cercle brisé.
Un point au centre.Elle ne savait pas à quoi elle servait.
Mais son cœur battait plus fort en la touchant.
Elle comprit qu’un autre chemin venait de s’ouvrir.
Un passage.
Et pour la première fois, elle n’avait pas peur.
Elle murmura, casque à la main :
— Je suis prête.
Et dans le silence, une note s’éleva toute seule claire et vibrante , une résonance.
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