Chapitre 1 – “L’amour te fait rêver, puis te laisse pleurer”

...> “L’amour te fait rêver…”...

...---...

...Elle détestait les matins....

...Parce qu’au réveil, tout lui rappelait qu’elle était encore en vie....

...Lucy ouvrit les yeux. La lumière dorée filtrait à travers les longs rideaux beige clair, caressant ses paupières lourdes. Elle resta un moment immobile, écoutant le silence du dortoir, coupé seulement par le léger ronflement d’une camarade. Ce son la ramenait à la réalité : un monde qui continuait de tourner, que ça lui plaise ou non....

...Elle se leva. Ses jambes tremblaient légèrement. Elle n’avait pas dormi. Encore une nuit passée à penser à tout… et à rien. Ses pensées erraient toujours au même endroit, ce lieu où les souvenirs et les peurs se confondaient jusqu’à la douleur....

...Devant le miroir, elle regarda son reflet. Ses cheveux noirs aux reflets bruns tombaient en mèches emmêlées autour de son visage fatigué. Sa peau couleur caramel semblait terne sous la lumière matinale. Ses yeux marron foncé, presque noirs, étaient cernés, délavés par la fatigue et la tristesse. Elle se demanda un instant à quoi elle ressemblait pour les autres. Peut-être à une fille ordinaire, invisible. Peut-être à une fille triste qu’on préfère ignorer....

...Son uniforme était prêt sur la chaise : jupe bleu nuit, chemisier blanc cassé, blazer gris clair avec l’écusson doré du lycée. Elle l’enfila sans émotion, attachant ses cheveux en queue basse. Ses gestes étaient automatiques, sans vie, comme si son corps savait que, quoi qu’il arrive, il fallait continuer....

...Elle inspira profondément. Ses épaules s’affaissèrent....

...> Aujourd’hui encore… rien ne changera....

...Elle attrapa son petit carnet beige, en caressa le cuir usé avec lenteur. Elle y trouva un réconfort étrange, comme si le toucher de ce carnet pouvait absorber ses angoisses. Elle l’ouvrit et lut ses mots écrits soigneusement, à l’encre noire qui tremblait parfois :...

...> “Un jour, je saurai ce que c’est… l’amour.”...

...Elle referma le carnet d’une main tremblante. Son cœur se serra dans sa poitrine, une douleur sourde, brûlante, mais terriblement familière....

...> “… puis te laisse pleurer.”...

...Soudain, un cri résonna dans le couloir. Lucy sursauta, son carnet manqua de tomber. Des bruits de pas précipités, des voix paniquées qui montaient et descendaient le couloir. Son cœur battait trop fort, cognant contre ses côtes comme pour lui rappeler qu’elle était encore vivante. Elle rangea son carnet dans son sac et sortit....

...Dans le couloir, la lumière matinale baignait les murs blancs. Le parquet grinçait sous ses pas. Elle croisa des groupes d’élèves surexcités, parlant fort, riant, se plaignant de la journée à venir. Tout ce bruit l’étouffait, mais elle n’en montra rien....

...Le réfectoire était déjà animé. Des élèves riaient en prenant des photos de leur petit-déjeuner, brandissant leurs téléphones décorés de breloques. Un vent frais, venu des fenêtres entrouvertes, faisait voleter ses mèches rebelles et la fit frissonner....

...Elle s’assit à une table isolée, face à la fenêtre. Ses yeux se perdirent dans le ciel nuageux teinté de rose pâle....

...Sur son plateau : un petit pain doré encore tiède, une salade de légumes croquants, un œuf dur parfait, un verre de jus de mangue frais. Tout était beau, appétissant. Mais elle mangea sans goûter. Chaque bouchée avait le goût de la poussière et du vide....

...> “L’amour te fait rêver, puis te laisse pleurer. Et moi… je n’ai plus envie de rêver.”...

...Elle posa sa fourchette, observant son reflet flou sur la surface du jus. Ses yeux brillaient légèrement, mais aucune larme ne coula. Ses larmes s’étaient tues depuis longtemps....

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