Le château Da Costa se dressait, fier et immuable, au sommet des collines d’Élyssia, comme un symbole de puissance et de grandeur. Ses tourelles blanches caressaient le ciel, et les jardins en contrebas semblaient taillés par les mains des dieux eux-mêmes, avec une précision et une beauté qui inspiraient l'admiration.
Assise devant son miroir à cadre doré, Freya Da Costa faisait glisser ses doigts sur une boucle blonde soyeuse, avec une douceur et une sensualité qui trahissaient son amour pour sa propre beauté. Elle portait une robe de soie ivoire, ourlée de fil doré, cousue sur mesure pour elle par les mains les plus expertes du royaume, qui mettait en valeur sa silhouette élégante et sa peau lumineuse. Un collier de perles reposait délicatement sur sa gorge, là où palpitait le cœur d’une héritière adulée, crainte... et redoutée.
"Mademoiselle, le carrosse est prêt," annonça sa servante en s’inclinant. "Le bal du roi vous attend."
Freya se leva lentement, faisant voler les pans de sa robe. "Que l’on sache bien ce soir... que la Rose du Duché est en pleine floraison."
La grande salle du palais royal débordait de faste, avec ses colonnes de marbre noir et son plafond peint d’étoiles dorées. Les nobles tournaient, riaient, buvaient, dansaient... et tous, absolument tous, s’inclinaient à son passage.
"Dame Freya ! Quelle vision divine !"
"Vous êtes plus belle encore que l’aube sur les montagnes de Célaria..."
" Puis-je oser une danse ?"
Elle refusait avec grâce, un regard suffisant, un rire léger. Ils repartaient, ensorcelés.
Jusqu’à ce que lui apparaisse. Adossé à une colonne, dans l’ombre, un homme observait la salle avec une distance presque méprisante. Il portait une tenue simple, sombre, impeccable. Sa stature droite, sa mâchoire marquée, et ses yeux... des yeux glacés, qui n’étaient tournés ni vers la musique, ni vers les dorures... ni vers elle.
_Igris Varrel._ Un murmure courait dans les couloirs : un chevalier d’un autre royaume, venu assurer la sécurité du roi. Froid, discipliné, incorruptible. Et surtout, _imperméable à toute forme de coquetterie_.
Freya le fixa, mais il ne la regarda même pas. Humiliation. Intolérable. Elle s’approcha, comme un fauve au pelage brillant.
"Messire," dit-elle avec une douceur empoisonnée, "je crains que vous ne soyez le seul à n’avoir point remarqué ma présence. Dois-je en conclure que vous êtes aveugle... ou simplement mal élevé ?"
Igris tourna enfin la tête, son regard tombant dans le sien, net, sans trouble. "Ni l’un, ni l’autre. J’ai simplement appris à détourner les yeux de ce qui éblouit sans chaleur."
Freya eut un léger sursaut, son sourire se transformant en une ligne mince et dure. "Vous êtes bien audacieux pour un homme qui n’est qu’un soldat."
"Mieux vaut l’audace sincère que la flatterie creuse, Dame Freya."
Le silence qui suivit fut tendu, l’air semblant s’être figé. Freya le détailla du regard, comme si elle le redessinait dans son esprit.
"Soit," dit-elle lentement, avec un demi-sourire. "J’aime les défis. Vous venez d’en devenir un."
Igris haussa à peine un sourcil, puis détourna les yeux. Mais Freya, elle, se détourna en reine, un feu nouveau venant de naître dans son cœur.
"Qu’il résiste," murmura-t-elle à elle-même. "Qu’il joue au marbre froid. Je suis la flamme. Et je vais le faire fondre."
Le banquet terminé, Freya ne dormit presque pas, son esprit hanté par le regard d’Igris. Pas parce qu’il l’avait admirée — non, justement parce qu’il ne l’avait _pas_ fait. Elle en avait vu des hommes puissants, fiers, froids. Mais tous finissaient par s’incliner. Tous… sauf lui. Et cela suffisait pour attiser sa volonté.
"Qu’il tombe amoureux de moi. Qu’il ploie comme les autres. Mais avec élégance… et douleur."
Le lendemain, elle arriva au jardin royal à l’aube, officiellement pour "visiter les serres impériales". Officieusement pour croiser Igris, dont on disait qu’il s’entraînait là chaque matin. Comme prévu, elle le vit, seul, épée en main, torse partiellement ouvert sous sa tenue de combat, enchaînant des mouvements précis, presque chorégraphiques. L’homme était un roc vivant, sculpté dans la discipline.
Elle attendit qu’il termine, puis s’avança, thé à la main, sourire en coin. "On dirait un dieu tombé sur le champ de guerre."
Il la regarda, sans même essuyer la sueur sur son front. "On dirait surtout une dame en mal d’attention."
Elle rit doucement, mais ses yeux s’assombrirent. "Toujours aussi charmant… Vous blessez mon cœur."
"Et pourtant, vous revenez."
Elle s’approcha, jusqu’à sentir la chaleur de sa peau. "Parce que vous m’intriguez. On ne rencontre pas souvent un homme qui préfère une épée à mes sourires."
"Peut-être parce que vos sourires ressemblent à des armes."
Le silence tomba, lourd de tension. Légèrement, Freya inclina la tête, un éclat de sincérité perçant enfin son masque. "Vous ne me plaisez pas… parce que vous ne cherchez rien. C’est rare."
"Et vous, vous plaisez à trop de monde… pour comprendre le vide derrière les compliments."
Il rangea son épée, son regard toujours fixé sur elle. "Si vous cherchez un jeu, dame Freya, trouvez un autre pion."
"Je ne cherche pas un pion. Je cherche une victoire."
"Alors vous perdez déjà."
Et il partit, laissant Freya seule, le souffle court. Pas de regard de désir. Pas de trouble. Juste une muraille, froide, infranchissable. Mais Freya Da Costa n’était pas une fille qui abandonnait. Elle appela sa suivante.
"Prépare une lettre. Non, deux. Une pour lui. Une pour mon père. Il va falloir une stratégie. Ce jeu ne fait que commencer."Plus tard dans la journée, Freya fit livrer à Igris un coffret en bois laqué, scellé du blason de sa maison. À l’intérieur, une plume d’aigle royal — rare, précieuse — et un billet finement calligraphié :
*« L’arme est peut-être votre domaine, mais l’élégance reste le mien. Quand vous serez las de l’acier, venez goûter au poison sucré des mots. — F. »*
Elle n’attendait pas une réponse immédiate. Ce n’était pas dans son style. Elle savait planter des graines, laisser les pensées mûrir comme les fruits interdits dans les jardins des dames. Mais à l’intérieur d’elle, un feu nouveau brûlait : une forme d’impatience, de rivalité presque... personnelle.
En soirée, lors d’un dîner plus restreint entre familles proches de la couronne, elle aperçut Igris au fond de la salle. Il n’avait pas touché au coffret, mais l’avait accroché à sa ceinture, comme une provocation inversée. Cela lui arracha un sourire. Il jouait. Lentement, prudemment. Mais il était dans la partie. Et Freya, elle, avait toute une guerre à gagner.
Deux jours s’étaient écoulés depuis leur dernier échange. Freya n’était pas restée inactive. Elle ne fonçait jamais sans plan — c’était une joueuse, une tacticienne. Et l’amour, même imposé, était un échiquier sur lequel elle excellait. Elle avait réuni ses alliées : _Victoire_, duchesse de Minales, fine langue de la cour, et _Orlan_, jeune baron naïf et amoureux transi d’elle. Tous deux, bien placés et faciles à manipuler.
Autour d’un thé au jasmin, elle exposa son plan. "Igris n’est pas insensible. Il est fermé. Trop habitué aux ordres, aux guerres, aux hommes rugueux. Il faut lui rappeler que l’élégance n’est pas faiblesse. Je veux éveiller son esprit, pas sa peau."
Victoire leva un sourcil. "Tu parles comme une stratège en guerre."
"Ce n’est pas l’amour que je veux. C’est sa défaite."
_Stratégie n°1 : Séduction intellectuelle_
Le lendemain, Freya fit porter à Igris un livre rare de philosophie militaire accompagné d’une note soigneusement rédigée :
"À celui qui manie l’épée, voici les mots d’hommes qui l’ont brandie avant lui. Peut-être, en comprenant leur sagesse, comprendrez-vous un jour les regards qu’on vous offre. – F"
Il ne répondit pas. Mais deux jours plus tard, elle surprit Igris en train de lire ce même livre, adossé à un mur, seul. Elle sourit. _Point pour moi._
_Stratégie n°2 : Provocation publique_
Lors d’un petit concert organisé au palais, elle s’avança sur la scène et prit place devant le clavecin. Sa robe était plus sage que d’habitude, mais son regard lançait des flèches. Elle joua une mélodie douce, ancienne, douloureuse même. Puis déclara :
"Ce morceau s’intitule _L’Insensible_. C’est l’histoire d’un homme qui a fui le feu, jusqu’à ce que celui-ci le consume lentement sans qu’il ne s’en aperçoive."
Les nobles rirent discrètement. Les regards se tournèrent vers Igris. Lui resta de marbre. Mais ses doigts se crispèrent légèrement sur la table. _Point encore ? Peut-être à demi..._
_Stratégie n°3 : Jeu d’alliances_
Enfin, elle visita l’un des généraux du roi, un vieil homme que son père avait soutenu jadis. Sous prétexte de s’intéresser à la politique militaire, elle glissa innocemment :
"Le chevalier Igris... semble distant. Peut-être qu’un peu de douceur dans son entourage rendrait ses décisions plus humaines ?"
Le général haussa les épaules. "C’est un roc. Mais même la pierre se polit avec le temps."
Le soir-même, Igris fut convoqué pour accompagner Freya lors de la prochaine chasse royale. Il la regarda, suspicieux.
"Vous maniez les courtisans comme d’autres les sabres."
Elle s’inclina gracieusement. "Je suis une femme bien éduquée, Messire. Et dans mon monde, les mots sont des armes."
"Ce n’est pas un jeu, Freya."
"Vous êtes déjà sur l’échiquier, que cela vous plaise ou non."
Il la fixa longuement. Et cette fois... ses yeux brillèrent d’un doute. Une fissure dans la glace. _Le jeu venait de vraiment commencer._
Et maintenant, Freya était prête à passer à l’étape suivante. La chasse royale allait être l’occasion parfaite pour mettre en pratique sa stratégie et voir comment Igris allait réagir dans un environnement plus sauvage et imprévisible. Le suspense était palpable, et Freya était prête à jouer son prochain coup.
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